Installation « Même Pôle Emploi m’a déconseillé l’agriculture »
Audrey Poincheval a dû batailler ferme pour faire accepter sa volonté de devenir chef d’exploitation. Elle témoigne de son parcours, alors que se tient à Dunkerque le 51e congrès de Jeunes Agriculteurs, consacré au renouvellement des générations.
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C’est son obstination qui saute aux yeux quand on rencontre Audrey Poincheval. Pas dans son discours qu’elle cherche à rendre le plus discret possible, mais dans ses actes et ce parcours qu’elle accomplit depuis qu’elle est adolescente. Audrey Poincheval fait partie de ces personnes qui avancent d’un pas ferme, mais sans vouloir trop déranger autour. D’où ses quelques détours, par souci de conciliation. Mais à l’arrivée, la jeune femme est bien parvenue à transformer son rêve en projet. Et de faire de sa passion pour les vaches et les chevaux, son métier.
« Tu vaux mieux que ça »
À 28 ans, la Haute-Marnaise a largué les sciences sociales pour passer un brevet professionnel de responsable d’exploitation agricole (BPREA) (l’équivalent du bac) en un an, à Chamarandes-Choignes. « En réalité, je n’ai jamais pu travailler dans mon domaine d’étude, la voie est complètement bouchée. Et de toute façon, ça ne me plaisait pas. Depuis que je suis enfant, je veux devenir agricultrice », explique-t-elle.
Sauf que la famille n’est pas du milieu et que l’agriculture, ça fait peur et ça rebute aussi, d’autant plus pour une fille. « Quand à 15 ans, j’ai dit que je voulais devenir agricultrice, mes parents m’ont dit : “Non. Tu es trop douée à l’école, tu vaux mieux que ça.” Il voyait l’agriculture comme une voie de garage pour ceux qui ne savent pas quoi faire ou qui ont des soucis en cours. »
En reconversion professionnelle
Alors Audrey Poincheval a fait des sciences sociales jusqu’à ce que son avenir se ferme et que son choix premier pour l’agriculture s’impose enfin. Mais en réalité, pas à tout le monde. « Pour le coup, pas de boulot, pas de débouchés… Ça me paraissait plus qu’évident d’oser faire ce que je voulais vraiment faire. Mais dans mon entourage, ça restait déplacé. En 2016, j’ai intégré un BPREA contre l’avis de mon conseiller de Pôle Emploi, contre l’avis de tout le monde en fait. Mais moi j’étais décidée. »
Et sa vocation s’est confirmée dès son premier stage. « Je me sens épanouie. Je l’ai sentie tout de suite. Je suis heureuse d’aller bosser. Et je n’ai pas envie de rentrer. » En une année, Audrey Poincheval a vu les portes s’ouvrir comme jamais. « J’ai rencontré beaucoup de monde, j’ai pu me rendre dans de très nombreuses exploitations grâce à des réseaux comme “Pas d’avenir sans agriculteur” qui m’a permis de découvrir d’autres systèmes d’exploitation. » Elle a pu aussi préciser son projet, bien spécifique : « Je voudrais faire du lait bio en 100 % pâture. Je sais que ça sera compliqué, Mais je n’ai pas fait tout cela pour rien. »
Recherche d’exploitation
Ces parents ont, depuis, compris l’exigence du métier, et l’ambition de leur fille, finalement, les a convaincus. « Ils sont prêts à m’aider, tout comme mes grands-parents qui me soutiennent. Ils apprécient finalement ce retour à la terre, à leurs origines. Tous leurs souvenirs remontent, et ils me racontent beaucoup de choses qu’ils ne m’auraient jamais dites auparavant. »
Audrey terminera dans quelques semaines sa formation. Une fois son examen en poche, elle prévoit de s’inscrire au service de remplacement pour continuer à apprendre son métier. Depuis plusieurs mois, elle cherche une exploitation à reprendre.
Rosanne AriesPour accéder à l'ensembles nos offres :